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#5 Confluence (Lyon) /  Mercredi 18 septembre 2024

Photographie : Bruno Dubreuil

Poétesse : Isabelle Paquet

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C’était il y a peu, très peu de temps, deux amants se jetant dans les bras l’un de l’autre se noyèrent sans même s’en apercevoir. Lui avait traversé plusieurs départements, furieusement. Elle avait traversé d’autres départements, tranquillement. Ils s’étaient retrouvés au bout du bout d’une presqu’île dont l’angle archi-saillant agressait l’horizon, où la végétation anarchique était rare, et l’air agité par des courants qui cinglaient leurs joues tour à tour comme autant de paires de claques. Pas de cygne mais quelques unes de leurs plumes disposées ici et là, une nuit passée, au gré des caprices d’un décorateur visible à l’unique œil d’une caméra de vidéosurveillance placée par la police de la métropole mais sans plus de personnel pour regarder les images. Quelques détritus, quelques crottes canines complétaient le paysage sans rien pouvoir ajouter à l’absence de ses qualités romantiques. C’est là que les bras des amants s’entrelacèrent, s’allongèrent, se ramifièrent affolés, liant leurs deux corps, étouffant leurs poitrines, leurs haleines agonisant en petits gémissements. Lèvres soudées, s’abreuvant l’un l’autre de leurs salives intarissables, se liquéfiant, ils s’écoulèrent dans le bleu-vert des eaux du fleuve, nullipares à jamais, pour rejoindre, quelques centaines de kilomètres plus au sud, quelques millions d’heures plus tard, comme des milliers de migrants, l’engloutissement éternel de la mer.

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